Publié le 26 septembre 2017 sur MIA, repris le 30 sept. sur Squat!net:
https://mars-infos.org/une-personne-abattue-lors-de-l-2608
https://fr.squat.net/2017/09/30/draguignan-83-une-personne-abattue-lors-de-l-expulsion-de-son-logement/
Draguignan (83): une personne abattue lors de l’expulsion
de son logement
septembre 30th, 2017
Ce mardi 26 septembre, à Draguignan dans le Var, la police a utilisé ses
armes et abattu un homme de 55 ans alors que celui-ci devait être
expulsé de son logement. Selon le procureur Ivan Auriel, il aurait «
ouvert le feu et blessé un commissaire » avant d’être tué.
Cette expulsion était le fruit d’une décision de justice, et le «
concours de la force publique » avait été autorisé pour procéder à son
application. C’est-à-dire que l’huissier, accompagné de forces de
l’ordre, pouvait contraindre les locataires à quitter leur logement.
C’est ce qu’il se passe généralement en cas de contentieux, d’impayés ou
de résiliation du bail et que les parties en présence ne sont pas d’accord.
Selon l’expression de la plupart des médias, qui reprennent l’AFP, cette
expulsion a « mal tourné« . Défendre sa maison les armes à la main n’est
en effet pas banal, tout du moins en France. Et nous ne sommes plus au
temps des grandes grèves de loyers
[https://infokiosques.net/spip.php?article660] et des autoréductions
collectives [https://infokiosques.net/spip.php?article620] où l’on
résistait farouchement aux expulsions.
Aujourd’hui, c’est plus vraisemblablement seul que l’on est expulsé. Et
on est de plus en plus à être seul.
En quinze ans, le nombre d’expulsions locatives a progressé de plus de
80%, allant chercher autour des 15.000 expulsions par an (une grosse
quarantaine par jour). En parallèle, une paupérisation accrue et une
précarité au travail de plus en plus importante rendent l’accès au
logement toujours plus complexe. Les propriétaires demandent toujours
plus de garanties. Un travail en CDI, par exemple. Ce qui devient de
plus en plus difficile à obtenir. Les procédures s’entassent. Et une
demi-douzaine de millions de personnes sont considérées mal logées en
France, tandis que pour une dizaine d’autres, tout reste très compliqué.
Les taux d’endettement sont en hausse constante et le nombre de
personnes à la rue explose.
Mais tout cela ne touche pas que les locataires. Le cas de l’Espagne est
frappant : entre 2008 et 2015, plus de 350.000 propriétaires se sont vu
saisir leurs logements par les banques du fait d’un endettement trop
important. La plupart de ces logements restent par la suite vides, ce
qui a conduit à des campagnes d’occupation de ces bâtiments saisis par
les banques dans plusieurs villes d’Espagne.
Lire aussi : Luttes contre les expulsions locatives à Turin
[https://infokiosques.net/spip.php?article1008].
De plus, avec le développement fulgurant de marchands de sommeil tels
qu’Airbnb, de nombreux propriétaires préfèrent désormais récupérer leurs
appartements pour y installer ces séjours temporaires bien plus
rentables. Au point que dans certaines villes telles que Barcelone (ou
d’autres endroits très touristiques), il devient difficile de trouver un
logement à louer de façon pérenne. De fait, tous les prix augmentent en
conséquence et le cycle s’en trouve renforcé.
Par ailleurs, d’autres personnes sont déjà mortes du fait d’expulsions
locatives : à Villejuif en octobre 2016
[https://www.humanite.fr/villejuif-quand-la-precarite-et-lisolement-menent-au-suicide-617347],
à La Rochelle en octobre 2014 [1], à Vénissieux en avril 2013 [2], à
Cugnaux en octobre 2010, à Istres en septembre 2008… et d’autres…
Mais ces fois-ci, les expulsions n’ont pas « mal tourné » : ces morts
étaient de « simples suicides ».
Cette fois, à Draguignan, le canon de l’arme était tourné dans l’autre
sens. Il n’y a pas grand chose à en dire, si ce n’est que ce n’était
qu’une question de temps avant que ce genre de chose ne se produise.
Lorsqu’on joue et qu’on spécule sur le désespoir des gens, il n’est pas
étonnant que certains se disent qu’ils n’ont plus rien à perdre.
De façon assez symptomatique, tant que le droit à la propriété primera
sur celui au logement, il n’y a aucune raison que la tendance s’inverse.
A moins que l’on ne croie les déclarations d’intention de Macron et de
son gouvernement, il y a fort à parier que ce genre de situation se
reproduira à mesure que, comme d’habitude, certains deviendront de plus
en plus pauvres et d’autres de plus en plus riches. Les récentes
réformes sur le droit du travail, sur la baisse des APL, sur une «
nouvelle politique du logement » ne font pas vraiment pencher la balance
dans le sens de la justice sociale.
Quand on sait que 3 millions de logements sont laissés vacants en
France, il existe une solution simple : mettre de côté l’idée de
propriété privée et occuper ces logements. Et le faire ensemble. Pour
que les maisons soient à celles et ceux qui y habitent. Pour ne pas
crever seuls à la rue ou sous les balles de la police.
Notes:
[1] cf. Le Parisien, 15 octobre 2014.
[2] cf. Le Figaro, 26 avril 2013.
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– Le Var sur Squat!net
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